Safari archéologique pour étudiants


Régina est une ville ferrovière. Toute exploration archéologique du territoire doit toucher au rôle du chemin de fer dans la perception des lieux.

Il faut faire preuve d’un peu d’imagination pour voyager dans le temps avec des élèves de 6, 7 et 8ème année et leur faire parcourir les ruelles des villes et villages des plaines de l’Amérique du Nord. Deux enseignantes de l’école Wilfrid Walker à Regina n’ont pas hésitées à se lancer dans l’aventure mardi dernier avec soixantaine de jeunes âgés entre 10 et 13 ans, ainsi que quelques parents.

Kathleen Harel et Nicole Fortin, toutes deux des éducatrices chevronnées, cherchaient une méthode originale pour faire vivre à ces jeunes esprits qui leurs sont confiés une expérience qui soit à la fois éducative et divertissante. Elles ont approché votre humble serviteur, qui met en scène depuis 1998 des expériences de découverte anthropologique dans de nombreuses communautés de la province. Équipé d’une maîtrise en archéologie et patrimoine d’une université britannique renommée pour ses recherches sur l’industrialisation et l’archéologie publique, l’approche employée porte donc sur la morphologie des villes ferroviaires et l’adaptation humaine aux nouveaux environnements. Regina est un cas-type de ville ferroviaire qui se prête parfaitement aux randonnées d’interprétation à thème.

Il suffisait de formuler une exploration urbaine, accessible, qui transcende les époques et de planifier un itinéraire qui permette aux élèves de bien se dégourdir les jambes. Il fallait concevoir des activités assez rythmées pour soutenir leur attention; prendre les mesures de sécurité qui s’imposent en terme de visibilité dans un environnement relativement achalandé; et, prévoir des détails importants comme les points d’eau pour prévenir la déshydratation par temps chaud.

Sur le plan pédagogique, le but était de faire prendre conscience aux élèves de l’accès privilégié qu’ils auraient à l’environnement des ruelles, accompagnés par un interprète apte à leur communiquer de l’information inédite sur la perception du territoire et l’exploitation humaine des espaces urbains. Selon la conseillère pédagogique de la Commission des écoles publiques de Regina, Jacinthe Hodgson, l’expérience est concluante » :

« C’est une visite extrêmement intéressante. J’ai moi-même appris un tas de choses sur l’évolution de la ville vu par l’entremise des ruelles. Les jeunes ont tous participés. Il y a plusieurs liens entre le contenu de l’excursion et le programme d’études. Pensons seulement à l’arrivée des premiers colons, l’interdépendance entre les habitants d’une communauté, la relation entre la communauté et le chemin de fer; et, la relation entre les communautés que le chemin de fer a permis d’établir il y a plus de 100 ans maintenant ».

Vous ne serez pas surpris d’apprendre que l’évolution des toilettes à travers les âges, la présence d’écuries, de chevaux et l’abondance de fumier dans les ruelles à une certaine époque ont particulièrement retenu l’attention des élèves dont la curiosité n’a d’égal que leur appétit inlassable pour les détails scatologiques.

Les élèves en apprennent beaucoup sur l’évolution des villages : comment les cours avant et arrière des maisons, les clôtures et les bâtiments recèlent tous des messages ou des signaux que nous apprenons à lire consciemment ou inconsciemment en tant que membre d’une communauté. Ils deviennent davantage sensibilisés aux différents modes de vie comme le nomadisme et la sédentarisation. Ils explorent leurs mérites respectifs tout au long de la randonnée. « Il nous disent que c’est plus agréable pour eux de le vivre sur le terrain que de le lire dans un livre », ajoute Jacynthe Hodgson.

À différentes étapes de l’excursion, les élèves ont pu tenir entre les mains des artéfacts amérindiens vieux de plusieurs siècles, dont ils ont pu admirer la technique de fabrication. Le but étant de les inviter à évaluer les avancements technologiques dans leur contexte respectif. Après tout, une lame préhistorique taillée dans l’obsidienne peut être aussi coupante que celle d’un scalpel.

« Nous avons demandé aux élèves d’apporter papier et crayons pour prendre des notes », explique Kathleen Harel. « Ils devront préparer un compte-rendu de leur excursion dont nous discuterons en groupe de retour en classe. Ils devront comparer la qualité de vie des gens ordinaires il y a 100 ans, à celle des citoyens d’aujourd’hui. Ils auront même à dessiner ce à quoi l’environnement des ruelles ressemblait il y a un siècle. Plusieurs semblent croire que la vie était beaucoup moins compliquée à l’époque qu’aujourd’hui. C’est plutôt révélateur. »

En terminant, je vous exprimerai toute la satisfaction m’a apporté cette occasion de partager un autre regard sur un environnement que nous croyons connaître et qui cache encore bien des secrets. Cette aventure scientifique d’un après-midi à aidé à mettre en valeur une ressource abondante autour de nous, un savoir-faire aussi qui est méconnu dans notre quotidien, que les anthropologues tentent de rendre à nouveau accessible pour le bénéfice de tous. Notre sentiment d’appartenance à ce territoire magnifique que nous habitons ainsi grandira, tout comme notre appréciation pour les communautés des Plaines.

Cordialement,

Claude-Jean Harel, MA MAHI FFST
cj@greatexcursions.com

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