Au pays des Inuvialuits

À Holman, aux confins du cercle polaire, une petite communauté aussi chaleureuse que créative vit isolée de la civilisation occidentale... tout en tirant profit du tourisme. Bienvenue au pays des Inuvialuits, les « êtres humains réels ».

PAR JULIE PLOURDE

De toutes les destinations touristiques canadiennes, l'Extrême-Arctique représente, pour plusieurs, le bout du monde, une terre inconnue et sauvage, indomptée et indomptable. Pourtant, chaque année, près de 300 touristes se rendent dans l'île de Victoria, au nord de la mer de Beaufort, dans les Territoires du Nord-Ouest.

Avec ses étendues glacées et ses falaises de roc qui ceinturent le paysage, l'île, aux confins de l'imaginaire, est une oasis de solitude et de quiétude. Holman, petite localité située sur sa côte ouest, attire un éventail de visiteurs, dont les mobiles sont aussi variés qu'inattendus : si certains veulent s'imprégner de la culture des Inuvialuits, d'autres viennent y pratiquer leur élan lors du tournoi de golf le plus septentrional d'Amérique du Nord.

Mais ce sont surtout des chasseurs qui débarquent ici, pour traquer l'ours polaire, le bœuf musqué et le caribou. Généralement méconnue, la pratique de la chasse dans les environs d'Holman est fort prisée des connaisseurs. Ainsi, chaque année, près d'une cinquantaine de personnes n'hésitent pas à survoler le pays en entier pour venir chasser le mammifère le plus dangereux de la planète, l'ours polaire.

L'expérience est unique. Des amateurs de partout dans le monde sont amenés en traîneau à chiens par des guides locaux, à l'un des camps situés le long de la côte. Deux semaines d'isolement, de promenade et de guet à la manière traditionnelle les attendent.

Mais pour apercevoir cette bête magnifique, les chasseurs doivent cependant délier les cordons de leur bourse. Ulukhaktuk Adventures, un pourvoyeur de Holman spécialisé dans la chasse sportive, demande environ 15 000 $ pour chasser avec un guide 14 jours durant, l'ours polaire. Pour la chasse au bœuf musqué et au caribou, la facture ne sera que de 3 200 $!

« La plupart des chasseurs de grands mammifères ont déjà pratiqué la chasse partout dans le monde et recherchent avidement l'aventure », estime le directeur du marketing du Bureau du tourisme des Territoires du Nord-Ouest, David Grindlay. Cette recherche de sensations fortes rapporte beaucoup à la petite localité d'environ 400 personnes : l'industrie de la chasse sportive embauche près de 60 personnes dans la communauté.

Mais pour les aventuriers qui ne veulent pas débourser autant d'argent et qui, de toute façon, n'apprécient pas l'idée de se frotter au plus grand carnivore de l'Arctique, la communauté de Holman a plus à offrir, si ce n'est que la rencontre avec l'un des peuples les plus chaleureux du monde, aux dires de plusieurs...

Inouïs Inuvialuits
Les Inuvialuits, ou « êtres humains réels », sont les Inuits de l'Arctique de l'Ouest, et vivent répartis dans six communautés des T. N.-O. Ce peuple, qui s'exprime en inuvialuktun, a connu maintes tribulations qui ont menacé sa survie. C'est ce qui rend ces gens uniques au monde, selon le conservateur et archéologue du Musée canadien des civilisations, David Morrison. « Ce peuple a su s'adapter à d'énormes changements culturels, probablement les plus importants de tout l'Arctique », explique-t-il.

Entre 1850 et 1910, près de 90 % de la population inuvialuite s'est éteinte des suites des maladies infectieuses transmises par les Européens. Malgré ces épidémies et la sédentarisation forcée, les Inuvialuits ont persévéré dans l'adversité. Aujourd'hui, leur culture est vivante, vibrante et colorée, comme en témoignent les remarquables gravures qui font la renommée de Holman et qu'on peut admirer à l'atelier d'art de la Holman Esquimau Cooperative.

« Holman est une communauté des plus artistiques. Les gravures sont très narratives. Particulièrement habiles, les artistes manient avec brio la technique du pochoir », explique la conservatrice de l'art inuit du Musée des beaux-arts de Winnipeg, qui possède la plus grande collection de gravures de Holman.

La communauté, qui vit essentiellement de chasse et de pêche, se spécialise aussi dans la vente de qiviuq, dont la valeur a atteint des sommets au cours des dernières années. Ce léger duvet que porte le bœuf musqué est soigneusement récolté par les femmes de la localité. Transformée dans le sud du pays, cette laine, plus douce que l'angora, sert à la fabrication de pulls, de bonnets et de moufles. Il semble même que certaines grandes métropoles de la mode, comme Londres et Paris, en ont fait leur petit secret...

Un peuple chaleureux
Malgré le climat rigoureux qui sévit au nord du 70e parallèle, la bonne humeur est omniprésente, chez les habitants de Holman. Le cinéaste Allan Booth, de Yellowknife, s'est rendu plusieurs fois dans la localité pour filmer le Kingalik Jamboree, un festival de trois jours qui a lieu au mois de juin et qui célèbre le retour du canard migrateur dans la région.

Chaque fois, il est impressionné par l'accueil de la communauté. « Ce peuple est différent, unique. Ils sont tellement hospitaliers! Les visiteurs se font traiter comme des membres de la famille. Je me demande pourquoi les gens d'ici sont si sympathiques! »

À cette question, la linguiste Emily Kudlak, originaire de Holman, ne peut vraiment apporter de réponse. « C'est probablement dû à la façon que nous avons de communiquer. C'est difficile à dire : Holman, c'est Holman... C'est unique ! » Lors du passage des chasseurs, la communauté organise des soirées de danse au tambour et de chant de gorge, et elle prépare le muktuk, un met composé de peau de baleine crue ou le quak, de la viande gelée crue.

Ce bain culturel accentue davantage l'impression que le temps s'est figé ici il y a des milliers d'années. Allan Booth, lui, se sent toujours très petit au cœur de cette terre qui se déploie à l'infini. « Je me dis toujours que c'est l'endroit le plus extraordinaire que je n'aie jamais vu. Il y a si peu de gens, et le territoire est tellement immense... Ça me donne l'impression d'être au commencement de la civilisation! »

Les temps modernes ont toutefois rattrapé les Inuvialuits pour qui ordinateurs, micro-ondes et moteurs à essence n'ont plus rien de nouveau. Mais les racines sont pourtant encore bien en vie, solidement agrippées aux glaces éternelles du territoire. Ce mariage de deux mondes façonne les nouvelles générations, comme celle d'Emily Kudlak, qui vient à peine d'atteindre le cap de la quarantaine. « J'ai été élevée dans l'ère moderne et je ne sais plus très bien où j'en suis avec mes repères historiques. Je sais que ma mère est née dans un igloo. Mais les aînés ont connu tellement de changements! »

Qu'on se rassure cependant : si la modernité a quelque peu rattrapé l'Arctique, le dépaysement demeure à coup sûr au rendez-vous. Et les Inuvialuits, eux, sont toujours aussi humains, toujours aussi réels...

Pour de plus amples renseignements sur cette destination ou sur d'autres destinations canadiennes, visitez le site de la Commission canadienne du tourisme à l'adresse www.voyagecanada.ca

source: Commission Canadienne du tourisme

Cette reproduction n'est pas présentée à titre de version officielle du contenu reproduit, ni dans le cadre d'une affiliation et/ou avec l'appui de la Commission canadienne du tourisme.

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