Le Massif : une montagne née pour être dévalée

Certaines des 36 pentes du Massif s'insinuent dans de splendides sous-bois.

Un site époustouflant, une montagne éclatante de beauté, du ski décoiffant et des activités des plus débridées : le Massif de Petite-Rivière-Saint-François, dans Charlevoix, est le centre de ski le plus jouissif de l'est de l'Amérique du Nord. À vos planches!

PAR HUGO PARADIS

Je me rappelle encore de l'ère des autobus, dans les années 80. À l'époque, à ses débuts, le Massif était une montagne vierge et sauvage, sillonnée par quelques pistes tracées sommairement pour permettre à tous les mangeurs de poudre du Québec de s'en mettre plein la bouille.

Aucune remontée mécanique ne grimpait alors sur le dos des pentes, et tous les skieurs devaient emprunter une navette - nom fallacieux décrivant ce qui était, en fait, un vieil autobus scolaire - pour regagner le sommet. Au mieux, en descendant rapidement, on pouvait s'offrir cinq descentes par jour, pas plus.

Pour ajouter au charme de l'expérience, les sorties s'effectuaient avec un guide afin de ne pas trop s'écarter des pistes battues, ou plutôt de ce qui en tenait lieu, car aucune dameuse ne travaillait les pentes. Et comme des tombereaux de neige s'entassaient sur les pistes très tôt en saison, le Massif devenait alors un pactole de poudreuse, surtout quand une bordée de cristaux frais venait tout juste de tomber du ciel.
En ces temps-là, le surf des neiges était plancha non grata dans tous les centres de ski de la province, sauf au Massif. Pour moi et les premiers adeptes québécois qui pratiquions ce sport tout neuf, c'était le nirvana. Non seulement pouvait-on dévaler des pentes bourrées de poudre pendant 45 minutes sans remonter, mais cette montagne nous acceptait comme nous étions, à savoir de drôles d'hurluberlus qui se prenaient pour des surfeurs mais qui préféraient les lames de neige aux rouleaux d'écume.

Une montagne sur mer

Aujourd'hui, le Massif est encore fréquenté par toutes sortes d'amants de la glisse qui, malgré leurs différences, ont ceci de particulier : ils arborent tous le même regard éberlué de joie. Qu'ils aient les pieds fixés sur une ou deux planches, ou qu'ils passent leur temps à s'agenouiller dans les pentes en y laissant leurs « télé-marques », tous partagent le même enchantement, celui de se retrouver ici, quelque part entre le ciel et la mer, en se demandant sans cesse s'ils ne sont pas en train de glisser sur la ouate des nuages.
Car dans l'est de l'Amérique du Nord, aucun autre centre de ski ne peut se targuer de bénéficier d'un site aussi privilégié. Cette « montagne sur mer », comme on se plaît à la surnommer, se dresse de toute sa superbe devant le fleuve Saint-Laurent, plus majestueux que jamais dans cette bellissime région qu'est Charlevoix. L'endroit est tellement spectaculaire que, parfois, on se demande si la pratique du sport n'est pas superflue, le simple fait de contempler les panoramas étant, en soi, pleinement satisfaisant.
Et puis, aucun autre domaine skiable n'affiche un aussi fort dénivelé (770 m), à l'est des Rocheuses. Pas surprenant que si la candidature de Québec avait été retenue pour les Jeux Olympiques de 2002, c'est ici qu'auraient eu lieu les compétitions de ski. Aujourd'hui, le Centre national d'entraînement de ski demeure par ailleurs unique, dans la province.

Si on trouve bon nombre de pistes familiales - dont une qui déroule lentement son long tapis blanc sur 3,8 kilomètres -, près de la moitié des 42 pentes sont marquées d'un diamant noir (de calibre très difficile) ou d'un double diamant (conditions extrêmes), comme c'est le cas de la sacro-sainte 42, une véritable perle sinueuse et bosselée à souhait, de la Sous-Bois, discrète mais efficace, et de La Charlevoix, seule piste homologuée « Descente coupe du monde femme » de l'est du pays.

Cette dernière est la seule piste, calibre compétition oblige, à s'élargir parfois jusqu'à 100 mètres, toutes les autres ne dépassant jamais 30 mètres afin de prémunir la station de l'érosion et des vents. C'est que le Massif a des comptes à rendre à dame Nature, puisqu'il se trouve en plein cœur d'une Réserve mondiale de la biosphère. On a donc convenu de ne pourvoir à l'enneigement artificiel que dans des proportions qui ne modifieront pas le cycle végétal, et on s'est refusé à construire des sites d'hébergement sur place, entre autres mesures.

Mais voilà que le Massif en est arrivé à une période charnière de son évolution, depuis que le cofondateur et ex-président du Cirque du Soleil, Daniel Gauthier, s'en est porté acquéreur, en 2002. Au cours des prochaines années, celui-ci compte faire de gros investissements afin d'optimiser les infrastructures de la montagne. C'est ainsi qu'au cours de l'année 2004, 5 millions de dollars ont été dépensés pour créer 6 nouvelles pistes, installer une remontée quadruple et déployer 90 nouveaux canons à neige. Pour le reste, nul ne sait jusqu'où ira le développement futur de la station, aucun plan directeur n'ayant été adopté pour le moment.

Une chose est sûre : le nouveau propriétaire aimerait bien faire du Massif une destination récréotouristique de premier plan et ce, l'année durant. Mais qu'on ne s'y trompe pas, car c'est bel et bien autour du ski et des sports d'hiver que Daniel Gauthier prévoit axer son développement. Rien là de plus normal : du haut de son sommet ou vue du fleuve, on voit bien que cette montagne est née pour être dévalée...

Pour de plus amples renseignements sur cette destination ou sur toute destination canadienne, visitez le site de la Commission canadienne du tourisme à l'adresse www.voyagecanada.ca.

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