Le développement et l’authenticité

(article publié initialement dans la revue TOURISME)

Authenticité. Ce mot est utilisé de plus en plus dans le milieu du tourisme, alors que les voyagistes et les destinations se débattent pour savoir ce qu’il signifie – aussi bien pour eux que pour les consommateurs.

L’authenticité pourrait se définir comme la nécessité impérative de refléter l’identité locale. Les gestionnaires touristiques de villes comme Canmore, en Alberta (où le tourisme génère une activité économique massive dans ce qui était autrefois une ville minière) sont très au courant de cet impératif; la nécessité de préserver un « sentiment d’appartenance » importe beaucoup pour des gens comme le directeur exécutif de Tourism Canmore, John Samms :

« Dirais‑je que ce que l’on offre à Canmore est authentique? Les sentiments que vous éprouverez à la vue du centre‑ville dépendront de vos antécédents. Les mines de charbon ont fermé en 1979 et la ville s’est presque éteinte. Puis, le centre‑ville a évolué, s’est ressaisi et a recommencé à croître, devenant le centre d’une collectivité, par opposition à celui d’une station de villégiature. Donc, dans ce sens, j’utiliserais le terme ‘authentique’. Canmore évoque chez le visiteur la notion de communauté, au lieu de lui présenter une sorte de décor qui aurait été préparé ou conçu pour lui plaire. »

Étant donné la période de mutation et de croissance rapide que traverse actuellement Canmore, M. Samms estime que le défi actuel est de préserver cet aspect inaltéré. D’un côté, il doit continuer à promouvoir l’authenticité, mais de l’autre, il contribue à orchestrer le changement.

« C’est là le paradoxe du tourisme », fait remarquer M. Samms. « La solution consiste à mobiliser la collectivité, tout en conservant une approche marketing qui a pour but d’attirer des gens qui partagent les principales valeurs de la communauté », dit‑il. « Ce principe est essentiel si nous voulons que notre industrie soit viable, car si nous ne parvenons pas à attirer des visiteurs qui partagent les valeurs de notre collectivité, cela augure mal pour notre industrie. Si nous avons vraiment l’intention de faire appel à des marchés dont nous savons qu’ils sont compatibles avec nous, il sera ensuite possible de faire valoir cette façon de penser aux gens qui s’occupent de développement. »

Cette approche ressemble à celle qu’a adoptée la ville de Saint John, au Nouveau‑Brunswick. Lori Jensen travaille à Tourisme Saint John : « Nous avons toujours pensé que nous offrions une expérience unique, ici, car il s’agit de la plus vieille ville incorporée du Canada. Nous associons une grande partie de notre authenticité aux sites patrimoniaux et aux immeubles historiques du secteur; pour nous, l’authenticité correspond à l’expérience unique que peut offrir votre ville. »

Mais ce n’est pas tout. Mme Jensen pense que le patrimoine architectural de la ville n’est qu’un des aspects de l’authenticité, et que l’hospitalité doit lui servir de complément. « Nous sommes très fiers de notre histoire, mais somme toute, ce sont les gens que vous rencontrez, pas seulement les infrastructures et les services, qui font la différence », explique Mme Jensen. « Nous venons tout juste d’interviewer trois propriétaires d’entreprise qui, à notre avis, proposent des expériences uniques et authentiques. L’un d’eux est collectionneur d’oeuvres d’art et d’antiquités, l’autre vend ses produits au vieux marché central, tandis que le troisième est un restaurateur d’origine allemande qui a immigré ici il y a quelques années et qui offre des mets ethniques nouveau genre qui commencent vraiment à s’implanter ici à Saint John. Nous avons essayé de faire valoir ces atouts dans des articles et des bulletins touristiques, pour que l’on sache qu’ils existent. »

Cette approche pourrait se révéler beaucoup plus efficace que le simple marketing, comme peut en témoigner Jill Vandall, partenaire de la Tourism Company, de Toronto : « L’authenticité est cruciale pour un certain nombre de raisons. Elle différencie les destinations et les villes. L’authenticité doit être bien pensée, car elle ne peut pas être mise en scène au point où elle étouffe tout ce qui peut se produire spontanément. Les gens veulent souvent la découvrir eux‑mêmes; ils ne veulent pas se rendre compte qu’on la leur vend. Un élément essentiel de l’authenticité consiste à convaincre les visiteurs d’explorer les environs, à [recourir] aux personnes qui ont vécu une partie de l’histoire et qui la racontent à leur manière. C’est une excellente manière d’utiliser les ressources de nos personnes âgées, dans les centres‑villes. »

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