Comment faire prendre son envol à une destination

(article publié initialement dans la revue TOURISME)

Dans certaines industries, les stratégies de développement touristique sont des secrets professionnels bien gardés, mais la direction générale du développement et des services touristiques de l’Alberta a eu l’amabilité de raconter à TOURISME comment elle a relevé le défi majeur de créer une nouvelle destination touristique.

La directrice exécutive de cet organisme, Louise McGillivray, et le directeur du développement de destinations et de produits, Kevin Crockett, sont deux des principaux promoteurs de la nouvelle région des Badlands du Canada. Mme McGillivray précise : « Nos collègues de Travel Alberta, qui surveillent l’évolution de marchés comme celui du Japon, se faisaient constamment dire par les grossistes qu’en dépit des incontournables Rocheuses, l’Alberta avait besoin de nouveaux produits et destinations. »

Développement économique Alberta a pour mandat de collaborer avec des entrepreneurs et des groupes communautaires albertains pour développer des produits touristiques dans le but de mieux répartir sur le territoire les retombées économiques du tourisme. « Nous avons interprété cela comme une invitation à mettre au point des produits de calibre international », a déclaré Mme McGillivray. Son équipe a alors posé un regard critique sur certaines des ressources touristiques albertaines et s’est rendu compte que la région des badlands (mauvaises terres) de l’Alberta présentait les meilleures possibilités.

Mme McGillivray savait d’expérience que l’adhésion des collectivités régionales est essentielle à la réussite de tout projet de développement. Elle a donc sillonné la région durant l’été de 2003, rencontrant des exploitants et des représentants de sept municipalités pour les inviter à participer à un projet de développement touristique, tout en mettant à l’essai des concepts publicitaires.

Kevin Crockett poursuit l’exposé : « Ces essais ont permis d’évaluer nos possibilités. Nous avons sondé presque tous les marchés qui, à notre avis, pourraient nous envoyer des visiteurs—l’Angleterre, l’Allemagne, le reste du Canada et les États‑Unis, particulièrement le Texas et la Californie. Nous avons mis à l’essai non seulement l’appellation (Canadian Badlands), mais aussi un concept polythématique regroupant notamment les ressources autochtones, l’histoire des ranches et l’éventail d’activités récréatives qui pourraient être offertes dans la région. »

M. Crockett pense qu’il était nécessaire que cette nouvelle région touristique ne soit pas connue simplement comme le pays des « badlands et des dinosaures ». Les résultats des essais ont aidé à mobiliser les municipalités : « Elles ont compris que les possibilités étaient plus grandes qu’elles l’avaient sans doute imaginé. Nous leur avons aussi fait savoir qu’à notre avis, cette région devait être vaste [et occuper, dans ce cas‑ci, une bonne partie du Sud‑Est de l’Alberta]. »

La prochaine étape consistait à créer officiellement un comité directeur municipal épaulé par des représentants de Travel Alberta et par d’autres responsables, qui aurait pour tâche de concevoir une stratégie axée sur la recherche afin de créer une destination polythématique et multidimensionnelle. « De concert avec la CCT et l’une des municipalités locales, explique M. Crockett, nous avons évalué les possibilités de l’ensemble du secteur et, ensuite, nous avons lancé une série de projets de planification touristique communautaire pour cinq sous‑régions [regroupements de collectivités] qui composeraient les Canadian Badlands. »

« Ce fut une étape très importante, car les municipalités avaient été réunies et avaient manifesté la volonté de participer au projet », poursuit M. Crockett. « Mais elles se demandaient ce qu’elles allaient faire : ‘Nous ne sommes que des petites collectivités agricoles’, disaient‑elles. À mon avis, elles avaient vraiment besoin de services de recherche et d’encadrement. Ces stratégies communautaires ont beaucoup contribué à mobiliser les gens et à faire comprendre le concept des badlands canadiens. »

Pour illustrer les progrès accomplis, M. Crockett donne l’exemple d’une des cinq sous‑régions (deux municipalités voisines du parc provincial Dinosaur, le village de Brooks et le comté de Newell) : « Nous avons réuni des représentants des municipalités, de l’industrie touristique locale et du parc provincial. Cela a donné lieu à un certain nombre d’initiatives qui se concrétisent actuellement dans le voisinage du parc et qui permettent à tous les joueurs de s’intégrer aux infrastructures touristiques. »

Louise McGillivray raconte comment les choses ont changé : « Il y a des années, le parc provincial Dinosaur offrait des excursions guidées dans la zone protégée du parc, selon le principe du premier arrivé, premier servi. Au plus fort de la saison, les visiteurs se faisaient souvent dire qu’ils ne pourraient pas monter à bord de l’autocar avant 15 h. Les gens de Brooks le savaient; alors, ils avaient l’habitude de dire à ceux qui descendaient à l’hôtel : ‘Les autocars sont trop occupés et vous ne pourrez pas embarquer avant la fin de l’après‑midi; ce n’est pas la peine de rester’. Les gens remontaient dans leur véhicule et poursuivaient leur voyage vers Calgary. Trois choses se passaient : le parc n’obtenait pas les visiteurs, l’hôtel de Brooks n’obtenait pas deux nuitées et les visiteurs n’avaient pas la chance de vivre une expérience exceptionnelle. »

M. McGillivray dit qu’à la suite des discussions portant sur le développement des badlands, le parc provincial a mis en place un système de réservations et que les visiteurs peuvent avoir l’assurance que s’ils se présentent au parc, ils obtiendront leur visite guidée.

Des circuits touristiques ont également été mis au point dans la région, ajoute Kevin Crockett : « Une fois sur place, les gens adorent les paysages, mais les distances qu’il faut parcourir entre chacune des grandes attractions présentent un défi. Nous avons embauché un expert‑conseil qui a suggéré de concevoir des circuits jalonnés d’attractions secondaires. On a pu ainsi ‘raccourcir’ les distances, tout en approfondissant l’histoire des badlands et en exploitant divers autres thèmes. À l’origine, il y avait six circuits, et maintenant, ils en préparent six autres, qui sont axés sur la visite pédestre de lieux historiques et sur de brefs parcours dans certains secteurs clés. »

On a vite reconnu qu’il fallait confier à un organisme distinct le développement de cette nouvelle destination. Le 15 août 2006, 35 municipalités ont fondé à cette fin une société sans but lucratif appelée Canadian Badlands Ltd.

M. McGillivray signale que « notre ministère continuera à participer intensément à cette initiative, [mais] si la région souhaite atteindre son plein potentiel, ses habitants devront manifestement se l’approprier. » La toute nouvelle société embauchera un directeur exécutif pour s’occuper d’administration et aider à faire progresser le dossier.

Pour renseignements, veuillez consulter : www.canadianbadlands.com.

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